Agile Business Conference : De retour de Londres

A l’heure où certains trouvent plaisir (ou intérêt) à agiter le spectre de la mort d’Agile, il est intéressant de constater qu’un nouveau domaine d’agilité est en train d’émerger : la BusinessAgility. C’était l’objet du troisième article de ma série sur “3 domaines d’accompagnement pour plus d’agilité” : Business Agility.

Je mentionne dans l’article que cette émergence peut se remarquer par une multiplication des conférences sur le sujet. J’ai eu l’opportunité que ma nouvelle boîte, le cabinet-startup le Singe Cuivre, m’envoie en exploration à Londres pour assister à l’une d’entre elles : l’Agile Business Conference.

AgileBizConf19
#AgileBizConf19

De retour de Londres, je partage avec vous quelques enseignements, réflexions et idées . Je me dis que ce sera peut-être utile (inspirant ?) pour certains organisateurs de conférences.

Agile Business Conference était co-organisée par un acteur historique Agile Business Consortium et un nouvel entrant dont nous reparlerons dans la 2ème partie : le Business Agility Institute. Un mariage a priori un peu surprenant entre :

– la conférence sur l’agilité revendiquée comme plus ancienne (les anglais aiment bien ce genre de record) puisque fêtant sa 25ème édition (quand même !). L’Agile Business Consortium est départ centrée sur DSDM. Rappelons que DSDM (Dynamic systems development Method) a des racines bien ancrées dans la gestion de projet. Représentée lors de l’élaboration du manifeste agile, il s’agit d’un successeur de RAD (Rapid Application Development) élaboré en Grande-Bretagne dans les années 90. Il est intéressant de regarder la page décrivant l’Agile Business Consortium car on y constate que nous sommes au cœur du « Complexe de l’industrie Agile » comme la nomme Martin Fowler.

« DSDM is the backbone to AgilePM® (APMG accredited Agile Project Management) exam (…) we’re the brains behind AgilePM®, AgileBA®, AgilePgM® and AgileDS™ and organise the longest running annual Agile Business Conference on the planet. Over 100,000 people around the globe are now AgilePM certified. »

Une grosse machine à certifier donc qui percute deux autres cash-machines : Scrum et SAFe !

– Le Business Agility Institute est une création beaucoup plus récente qui a fait de la #businessAgility son cheval de bataille.  On trouve SolutionsIQ (Accenture) dans les membres fondateurs. L’institut s’incarne dans son très actif fondateur et CEO Evan Leybourn, par ailleurs auteur en 2013 du livre Directing the Agile organization. Un autre contributeur aux travaux de l’institut est agilityHealth qui collabore au rapport annuel : le Business Agility Report.

L’institut organise ainsi ses propres conférences sur tous les continents : Business Agility Conferences ( NYCViennaAfricaAustraliaIndia, London) et il se murmure bientôt Paris.

Join a global community of next-generation agile organizations comprised of industry leaders, growth companies and startups.”

On voit que les ennemis communs font les bons amis car il s’agit bien de nouer une alliance contre l’hégémonie Scrum-SAFe. Ce contexte posé, aucun prosélytisme durant la conférence, la partie commerciale restait cantonnée aux stands des sponsors. Élégance anglaise.

Organisateurs
Organisateurs

Vivent les mariés !

Mes interrogations

J’avais trois grandes questions en me rendant là-bas :

1 – pourquoi des conférences #businessagility à Londres, à Vienne…et pas à Paris ? La langue ? Une exception culturelle ? Les fromages qui puent ?

2- en quoi une conférence #businessagility est différente d’une conférence habituelle : AgileTour, AgileEnSeine…

3- #businessagility : fake marketing ou mouvement de fond ?

Qu’en est-il ? Réponse en trois articles.

Retard français ? La langue ?

Pas de conférence se revendiquant du mouvement #businessagility en France. La plus proche serait sans doute FlowCon France (ex LeanKanban Fr) où l’on a pu entendre certains des conférenciers présents à Londres : Dan North, Bjarte Bogsnes/Beyond Budgeting… Cependant FlowConFr est encore très ancrée dans les références de l’Agile-IT : technologie, équipe de développeurs, frameworks historiques, cf son site : “Kanban, l’agilité, la livraison continue, l’expérience utilisateur, la gestion décentralisée, etc.” Pour moi, l’un des intérêts principaux que présente FlowConFr est la possibilité d’entendre des speakers internationaux, alors qu’ailleurs nous avons tendance à nous retrouver en échanges franco-français.

Mon hypothèse est donc que la barrière de la langue nous retarde par rapport à nos voisins du nord de l’Europe.

L’agilité reste un domaine où les États-Unis font la course en tête. Quelques échanges avec des exposants, organisateurs, ont évoqué une différence de maturité entre New York et Londres, cette dernière étant aussi en retard sur la Big Apple.

Ces échanges m’ont également amené à penser que si les pays scandinaves, en particulier la Suède, sont dans le tempo, les autres pays européens suivent avec quelques années de retard.

Rien de nouveau en France, puisqu’il a fallu attendre 2002 pour voir la traduction en français du livre eXtreme Programming de Kent Beck paru en 1999. Nous perdons du temps à cause de notre langue. Mais nous perdons également des interactions. Je n’ai pas la liste exhaustive mais les personnes que j’ai pu croiser à Londres venaient des Pays-Bas, des Etats-Unis, d’Afrique du Sud, de Suède, de Belgique, de Pologne, de Russie… Et cela dans une conférence de taille réduite puisque nous étions moins de 200 personnes. On voit le brassage culturel et le métissage d’expériences que cela représente.

A une époque où l’Europe est une région, Londres est un hub, Paris une préfecture de province.

Une conférence différente ?

Mon deuxième sujet de curiosité était de voir si une conférence anglaise revendiquant le label #BusinessAgility présentait des différences notables avec, par exemple, un Agile Tour.

Hé bien, oui c’est différent : toute le monde parle anglais !

Au-delà de cet aspect très surprenant pour un français, oui encore à la fois dans le fond et la forme.

Un format original

Je vais développer un peu la structure même des deux jours de conférence car je pense que cela peut intéresser mes collègues organisateurs.

Plénière et Tables
Plénière et Tables – Credits @mikaelleinskold

Pas de tracks en parallèle, tous les participants sont réunis dans la même salle, répartis autour de tables d’une dizaine de personnes. A chaque table est présent un facilitateur reconnaissable à son tour-du-cou orange.

Les gentils facilitateurs
Les gentils facilitateurs

Des moments facilités

Le premier jour, deux moments de 20 mn sont ainsi consacrés à des échanges facilités : les Facilitated Deep Dives. Bonne idée mais non transformée finalement.

Bonne idée, car il s’agit de faciliter des moments d’échanges entre les participants pour socialiser l’apprentissage, c-a-d apprendre individuellement en partageant ensemble ce que chacun a appris. Intention non réalisée, car 20 mn pour des échanges à 10+1, cela laisse très peu de temps pour approfondir quoi que ce soit. Au final plutôt un icebreaker frustrant qu’un Deep Dive…Ce qui amène tout de même l’impact positif que certaines conversations se poursuivent ensuite lors des pauses.

Un aperçu du programme

Vous pouvez retrouver le programme en ligne.

Panel Discussion

La première journée se terminait par un Panel Discussion : l’occasion pour les participants de poser des questions par voie électronique et à un panel d’experts d’y répondre. Le maître de cérémonie était ici Dan North et diversité oblige le panel était constitué d’expertes. Personnellement, j’aurais trouvé plus probant d’inverser et d’avoir une maîtresse de cérémonie gérant la parole d’experts. Le mâle était encore dominant malgré les apparences ! La photo le montre un peu…

Panel Discussion
Panel Discussion – Credits: @enablingresults

Business agility against the Odds: a panel Discussion facilitated by Dan North.

Workshops

La matinée de la 2è journée s’ouvrait par 2h de workshops de 30 mn.

Là encore, il n’est pas évident de concrétiser l’intention initiale plutôt ambitieuse. Le challenge pour les orateurs est important : présenter un sujet original, puis proposer à 200 personnes réparties sur une quinzaine de tables un atelier collaboratif. Tout cela en 30 mn. Les résultats ont été très divers. Certains n’ont même pas essayé, comme Bjarte Bogsnes qui a redonné son introduction à Beyond Budgeting As Usual (pour ceux qui l’ont déjà vu, celle avec l’analogie entre les feux tricolores et les ronds-points).

D’autres ont bien joué le jeu comme Leila Roo qui nous a fait explorer son compas de l’agilité :

Leila Roo
Leila Roo – Credits @AgileArtisan

Compass for agility: https://www.agileconference.org/speaker/leila-rao/

Entre les deux, on sentait la figure imposée, un exercice plus ou moins pertinent collé à la fin de la présentation théorique pour cocher la case, mais avec un apprentissage très limité.

Bilan mitigé.

Agile Tools Sessions

Le 2ème jour étaient proposées des Agile Tools Session : 16 tables = 16 sujets portés par un intervenant pendant 45mn.

J’ai pour ma part choisi le sujet de la table 9 : An Agile Approach to Strategy Development and Strategic Execution animé par l’américain Scott Hutcheson. Scott n’avait pas fait le voyage pour rien et il était quand même un peu là pour vendre son bouquin Strategic Doing : : Ten Skills for Agile Leadership et les formations correspondantes.

Scott Hutcheson
Scott Hutcheson

C’est le jeu et Scott l’a bien joué en proposant un véritable atelier qu’il a essayé de dérouler avec une quinzaine de personnes intéressées par le sujet. Il nous a fourni quelques pages imprimées pour nous entraîner aux 10 règles décrites dans son livre.

Ici mission accomplie selon moi : suffisamment de temps et de contenu pour me faire une idée si le sujet mérite d’être creusé ou pas. Un bon indicateur d’intérêt suscité chez moi c’est quand je prends des notes sur des associations que j’ai faites avec d’autres sujets ou des idées d’application possibles. C’était le cas ici pour l’une des sessions qui m’a ouvert des pistes. Les dix règles de Strategic Doing nous invitent à appliquer une démarche appréciative et matinée de Solution Focus à une élaboration de stratégie. Celle-ci sera exécutée et adaptée en enchaînant avec agilité des cycles courts de 30 jours.

Strategic Doing Cycle
Strategic Doing Cycle

A suivre…

Dans la suite de cet article, je traiterai du contenu des autres sessions, puis de #BusinessAgility, promesse ou réalité et des idées que j’ai notées lors de ces deux jours.

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